Année A - XVIII Ordinaire (Mt 14, 13-21) Réflexion sur l’Évangile du dimanche et des Fêtes
par Andrea De Vico, prêtre
correction française: Nicolas Donzé, toxicologue;
Anne Mayoraz, éducatrice
“ ‘L’endroit est désert et il se fait tard. Renvoie donc la foule: qu’ils aillent dans les villages s’acheter à manger!’ Mais Jésus leur dit: ‘Donnez-leur vous-mêmes à manger’ ”
La liturgie associe les paroles de Jésus à une ancienne prophétie: “Vous tous qui avez soif, venez, voici de l’eau! Même si vous n’avez pas d’argent, venez acheter et consommer, venez acheter du vin et du lait sans argent, sans rien payer” (Is 55, 1). Isaïe prêche à Jérusalem six siècles avant Jésus-Christ, au moment de la reconstruction, après la triste expérience de l’exil de Babylone. Le prophète revient dans la ville sainte et il se présente en héraut itinérant, en concurrence ouverte avec les grands commerces du boom économique du post-exil. Dans la place publique, tout le monde hurle et fait la publicité de sa marchandise, provoquant la réaction du prophète: “Pourquoi dépenser votre argent pour ce qui ne nourrit pas, vous fatiguer pour ce qui ne rassasie pas?” (Is 55, 2)
Dans le livre des Proverbes, nous trouvons la Sagesse personnifiée qui s’adresse aux gens qui passent: “La Sagesse a bâti sa maison, elle a taillé sept colonnes. Elle a tué ses bêtes, et préparé son vin, puis a dressé la table. Elle a envoyé ses servantes, elle appelle sur les hauteurs de la cité: ‘Vous, étourdis, passez par ici!’ À qui manque de bon sens, elle dit: ‘Venez, mangez de mon pain, buvez le vin que j’ai préparé. Quittez l’étourderie et vous vivrez, prenez le chemin de l’intelligence” (Pr 9, 1-6) Mais le banquet de la Sagesse n’est pas très populaire. Les hommes préfèrent fréquenter la maison de madame la Folie, et célébrer leurs fêtes avec les revenus de l’injustice et de l’impiété. La chanson de la Folie est bien différente: “Vous, étourdis, passez par ici! Bien douce est l’eau qu’on a volée, savoureux, le pain pris en secret!” (Pr 9, 16-17)
Aujourd’hui, deux mille six cents ans après Isaïe, si nous allons dans un centre commercial, nous retrouvons la même scène: différents types de marchandise creusent facilement leur niche dans le marché, et attirent un flot engourdi d’acheteurs, tandis que la Sagesse se retrouve sans compagnie, comme une femme vertueuse sans prétendant! Si un héraut commençait à dire: Que faites-vous là? pourquoi vous êtes si occupés à vous acheter des trucs qui ne satisfont pas? Venez plutôt à la maison de la Sagesse! Cet homme serait devenu fou et immédiatement écarté par la sécurité.
Nous reprochons à Dieu les maux qui sont dans le monde: avec tous ces gens affamés, pourquoi Dieu ne fait-il pas quelque chose, pourquoi ne multiplie-t-il pas encore le pain aujourd’hui? Bien sûr, Dieu multiplie et le fait à l’échelle planétaire! Les campagnes du monde entier sont enflées de céréales, des flottes de bateaux hyper-technologiques jettent d’énormes filets dans toutes les mers du globe, il y en a pour tous! Ensuite, afin de ne pas faire baisser les prix, des milliers de tonnes de nourriture sont détruites chaque jour. Ceux qui produisent le font presque sans frais, et ceux qui consomment se retrouvent avec un prix en flèche, en raison de la lourde chaîne d’approvisionnement sur le marché. Une génération entière d’agriculteurs a été forcée d’abandonner la campagne et de laisser l’agriculture entre les mains de quelques monopoles. Le monde recule!
Jésus nous offre une indication précieuse: il n’y a un miracle que si nous le réalisons. Si la richesse thésaurisée n’est jamais suffisante pour satisfaire son riche propriétaire, le peu qui est partagé entre plusieurs est suffisant et il (avance) augmente: n’est-ce pas un miracle? Y a-t-il la faim dans le monde? Le Maître nous dit: donnez-vous quelque chose à manger! J’ai fait mon miracle, maintenant c’est à vous de faire! L’Eucharistie signifie que, plutôt que de chercher le Christ dans le pain, nous devons le rechercher en partageant le pain. Plus que dans la matière du pain, le Christ se retrouve dans le geste du partage. La révolution agroalimentaire commence par moi, par mon style de vie, la sobriété de ma vie et ma volonté de partager le peu que j’ai!
Amen
Astuce : Et une fois que tu as trouvé la page qui contient cette info, utilise la commande de ton clavier ctrl+F afin de faire une recherche sur la page.